Revue des sciences sociales n° 26/1999

L’honneur du nom, le stigmate du nom

Le nom est à l’interface de l’identité individuelle et de l’identité sociale. En lui se condense tout ce que le sujet se représente de lui-même, en même temps que tout ce que les autres se représentent de lui. Le patronyme nous inscrit dans une…

Le nom est à l’interface de l’identité individuelle et de l’identité sociale. En lui se condense tout ce que le sujet se représente de lui-même, en même temps que tout ce que les autres se représentent de lui. Le patronyme nous inscrit dans une filiation, il définit une origine et une appartenance à une lignée. Le prénom nous différencie parmi les membres de cette communauté d’appartenance. Dans de nombreuses sociétés, ces deux fonctions se déclinent par le recours possible à plusieurs prénoms, plusieurs patronymes, des surnoms, des noms d’appartenance clanique, etc. Le nom est de ce fait le lieu de tous les enjeux subjectifs et collectifs. Modifier le nom, c’est modifier l’identité de celui qui le porte, et jusqu’à son être propre: dans les société traditionnelles, les insultes comme les pratiques magiques les plus efficaces sont celles qui impliquent une manipulation du nom. La clinique de la folie révèle systématiquement la perte des mécanismes de repérage subjectif attachés au nom propre. Le nom peut être arboré fièrement, il exprime un “re-nom”, ou au contraire il peut être caché, signe de honte. Les régimes totalitaires atteignent ceux qu’ils veulent détruire en remplaçant leur nom par un numéro, dans un processus qui banalise l’élimination physique de ceux qui avaient déjà cessé d’exister symboliquement et socialement.

Toutes les disciplines des sciences humaines sont ici sollicitées. Rien d’étonnant que le nom demeure le lieu et l’objet de tensions dynamiques: entre ce qui pousse l’immigré à en changer pour échapper au jugement des autres, ou ce qui incite au contraire une femme qui se marie à garder son patronyme; entre, d’un côté, la liberté que revendique le particulier de pouvoir choisir le prénom de ses enfants, ou de changer lui-même de nom, ou de prendre un nom d’auteur, et, de l’autre, la réglementation de ces choix par la société, pour maintenir un repérage nécessaire de ses membres, mais aussi pour garantir leur existence, tant sociale que psychique. Nommer, c’est exercer une emprise sur soi et sur l’autre.

Numéro Numéro 26
Première édition
Langue : français
Nombre de page : 192
Dimensions (Lxl) : 24 x 20 cm
CLIL : 3080 - SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES
BISAC : SOC000000
THEMA : J et JB

23,00  TTC

Thématique(s) :
Date de parution : 01/12/1999
Nombre de pages : 192
EAN : 9782354101046

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